I. - Aspects historiques et technologiques du projet
1 - Un peu d’histoire :
L’Histoire connue de la fusion nucléaire commence avec l’Univers, lorsque les énormes quantités d’Hydrogène libérées lors du Big-bang se sont échauffées, elles ont commencé à fusionner et à libérer encore plus de chaleur. La fusion s’est ensuite poursuivie, et se poursuit toujours, au cœur des étoiles, leur permettant de produire de la chaleur donc de la lumière.
Cependant, même si la fusion nucléaire a lieu depuis plus de 15 milliards d’années, sa découverte est relativement récente. La chronologie ci-dessous résume les étapes de sa découverte, et de l’élaboration du projet ITER.
- 1929 : Deux physiciens, Atkinson et Houtermans prédisent la possibilité d'obtenir de l'énergie en faisant fusionner des noyaux atomiques
- 1950 : Sakharov, un autre physicien, invente le concept du réacteur à fusion, le Tokamak
- 1952 : Première utilisation de la fusion: la bombe H par les États-Unis
- 1985 : l'URSS propose aux États-Unis de construire un Tokamak
- 1992 : L'Europe, le Japon, la Russie et les États-Unis signent un accord visant à permettre la construction d'une installation expérimentale
- 1998 : Fin de la première phase d'ingénierie, les partenaires cherchent à réduire le coût du projet, car les États-Unis se retirent du projet
- 2003 : Les États-Unis réintègrent le projet, ainsi que la Chine et la Corée du Sud
- 2005 : Cadarache est choisi comme site d'accueil du projet ITER
L’Histoire de la fusion nucléaire est loin d’être finie, elle ne fait que commencer. Mais elle reste encore incertaine, de nouveaux défis technologiques apparaissant constamment.
2 - L’aspect technologique
a - Une réaction de fusion
La fusion nucléaire est réalisée dans un réacteur en forme de tore, appelé Tokamak.
Le principe de base d’une centrale à fusion est le même que pour les centrales à fission nucléaire et les centrales thermiques à flamme : le principe de la machine à vapeur.
Les combustibles utilisés par un réacteur à fusion sont le Tritium et le Deutérium, deux isotopes de l'hydrogène.
Pourquoi utiliser ces combustibles en particulier ? Parce que c’est avec eux que la réaction est la plus simple à réaliser et qu’elle produit en même temps le plus d’énergie :
En effet, la fusion d’un atome de Deutérium et d’un atome de Tritium produit un atome d’Hélium et un neutron. Ce neutron est dit « rapide », il est hautement chargé en énergie. Le champ magnétique déployé par les bobines toroïdales étant insuffisant pour le stopper, il va continuer sa route jusqu’aux parois du Tokamak. Les chocs répétés entre ces neutrons et les parois dégagent de grandes quantités de chaleur. Cette chaleur est absorbée par l’eau circulant autour du Tokamak, qui va s’évaporer. Cette vapeur va actionner une série de turbines, qui elles même vont actionner des alternateurs, qui vont produire de l’énergie.
Mais ce bombardement neutronique intense a aussi un mauvais côté : il irradie les parois du Tokamak, qui doivent être changées régulièrement, et qui constituent donc des déchets radioactifs. Ils sont néanmoins beaucoup moins nombreux que ceux produits par une centrale à fission nucléaire, mais qui ont surtout une durée de vie beaucoup moins longue, plusieurs millions d’années pour les déchets issus de la fission, contre une cinquantaine pour ceux issus de la fusion nucléaire.
Les combustibles utilisés par un réacteur à fusion sont le Tritium et le Deutérium, deux isotopes de l'hydrogène (voir dossier Fusion/Fission).
Nous allons maintenant imaginer le déroulement d’une réaction de fusion à l’intérieur d’ITER.
Le combustible, deux grammes de Deutérium et un gramme de Tritium, est introduit dans un premier temps sous forme gazeuse dans le Tokamak à vide, puis, au cour de la réaction, sous forme de glaçons. Un arc électrique vient amorcer la réaction, puis les trois systèmes de chauffages prennent le relais. Rapidement, la température à l’intérieur du Tokamak atteint les 200 millions de degrés. Les atomes de Deutérium et de Tritium perdent tous leurs électrons, on dit qu’ils sont complètement ionisés, le combustible passe à l’état de plasma. A l’intérieur de ce plasma circule un courant d’une intensité de 15 Méga-Ampères. Ce plasma est maintenu dans une « enceinte virtuelle » de 840 mètres cubes par les bobines toroïdales qui génèrent un champ magnétique de 5.3 Teslas, environ 1123 fois le champ magnétique terrestre. Ces bobines toroïdales sont refroidies à -269 degrés Celsius, afin d’exploiter les propriétés supraconductrices des métaux qui les composent.
Plus la chaleur augmente, plus les molécules bougent, et plus elles bougent rapidement. Les particules chargées en énergie sont confinées par le champ magnétique. Sans ça, le Tokamak exploserait. La vitesse des noyaux de Deutérium et de Tritium augmente de plus en plus, jusqu'à vaincre la barrière coulombienne. Les noyaux d’atomes de Deutérium et de Tritium fusionnent alors deux à deux, ce qui produit un noyau d’atome d’Hélium 4 et un neutron. Ce neutron est hautement chargé en énergie, on estime son énergie cinétique à 14 MeV. Ce neutron, trop rapide pour être stoppé par le champ magnétique, va venir heurter les parois du Tokamak. Ces chocs répétés vont produire de la chaleur, mais vont aussi irradier ces parois, ce qui impliquera de les remplacer régulièrement.
Le dégagement d'hélium s’intensifie, ainsi que celui de chaleur. La réaction de fusion s'intensifie, d’autres noyaux fusionnants grâce à la chaleur dégagée par les autres réactions de fusion. A partir de 400 secondes de réaction, la chaleur dégagée par les réactions de fusion devient trop importante, le réacteur s’arrête, ce qui ne sera pas le cas dans les réacteurs industriels, censés fonctionner en continu.
b - Une centrale à fusion
Une centrale à fusion nucléaire aura le même aspect extérieur qu’une centrale à fission.
Les imposantes cheminées d’évacuation de l’eau sous forme de vapeur seront toujours présentes, le principe de base de la production d’énergie étant conservé, c’est celui de la machine à vapeur. Cependant, d’après le CEA, les cheminées d’évacuation des centrales à fusion seront significativement plus petites que celles des centrales à fission actuelles. Les centrales à fusion se trouveront donc aussi à proximité d’une importante source d’eau (lac, fleuve, mer, etc.). Dans le cas d’ITER cette source d’eau sera la Durance.
La centrale nucléaire Cruas Meysse en France :